Al-Hoceima, perle de la Méditerranée

Depuis Nador, ville portuaire d'un million d'habitants, j'ai vite rejoint Al-Hoceima, 150 kilomètres plus à l'ouest en direction de Tanger. En route, le bus s'arrête dans un village pour faire le plein. On lui verse du « gaz d'Alger » dans le réservoir, l'essence de contrebande venue du pays voisin coûte bien moins cher. Pour la police, c'est même gratuit. Au bout de trois heures de route et après la montagne, nous arrivons à Al-Hoceima.

Très jolie ville nichée sur une petite pointe au bout de la terre. La mer est partout. En été, les belles plages sont bondées de touristes marocains. Al-Hoceima est aussi appelée la perle de la Méditerranée. Sûrement à cause des baies magnifiques, des eaux turquoise ou encore des falaises qui se jettent dans la mer, tout autour de la ville. Le roi a ses habitudes ici.

Une ville rebelle

Al-Hoceima est aussi connue pour le rôle historique qu'elle a eu pendant la guerre du Rif. C'est la ville d' Abdelkrim al-Khattabi. En 1919, il commence à unir différentes tribus berbères en vue de fonder une république du Rif. En 1921 c'est la guerre. Les Espagnols sont lourdement défaits lors de la bataille d'Anoual et la république du Rif peut être proclamée en 1922. Les Français s'engagent dans le conflit aux côtés des Espagnols et c'est en bombardant massivement les villages au gaz moutarde qu'ils emportent la guerre cinq ans après.

En 1958, deux ans après l'indépendance du royaume, c'est contre les autorités marocaines que les habitants de la ville rebelle se soulèvent. La révolte du Rif leur coûte cher. La région a été soumise au régime militaire pendant plusieurs années. Elle a ensuite été complètement délaissée par le pouvoir central. Aujourd'hui, de nouveaux projets économiques naissent et des infrastructures sont construites. Petit à petit, le nord-est du Maroc se désenclave.

Cinq morts le 20 février

Mais Al-Hoceima a refait parler d'elle récemment. Dans le sillage des révolutions tunisiennes et égyptiennes, d'importantes manifestations ont été organisées dans tout le pays. Elles étaient pacifiques presque partout ailleurs, mais à Al-Hoceima il y a eu cinq morts le 20 février. Les corps ont été retrouvés dans des circonstances troubles à l'intérieur d'une banque en feu. Des centaines de personnes ont été blessées et interpellées. Depuis cette date, la place Mohamed VI est occupée chaque dimanche par les membres du mouvement du 20 février. Comme partout ailleurs au Maroc.

Au pays des Amazights

Ceux que je croise à Al-Hoceima sont Amazights. Tout le monde ici est Amazight. «  Nous ne sommes pas des arabes », aiment-ils préciser. Les Amazights sont les Berbères. Dans la rue, on parle Tamazight. Ici, l'arabe n'est utilisée qu'à l'école ou dans les administrations. Les Amazights sont très fiers de leurs racines. Ils vivent ici depuis toujours, bien avant les conquêtes arabes et l'expansion de l'Islam.

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