Lutopik 9

Sciences : un enjeu de société

Les sciences, ou plutôt les innovations qui en découlent, irriguent notre quotidien. Médecine, agriculture, communication, énergie ou même textile, aucun pan de nos vies n’échappe à la technique. Pourtant, le citoyen reste à l’écart des orientations de la recherche ou des choix scientifiques.

Les difficiles débats scientifiques

Énergie nucléaire, nanotechnologies, OGM, etc., les controverses scientifiques et technologiques suscitent des débats de société sans que les citoyens n’aient vraiment leurs mots à dire.

Difficile d’organiser sereinement des débats publics autour des grands projets et des questions scientifiques. En 2009-2010, celui consacré aux nanotechnologies est fortement perturbé par ses détracteurs, au point que des réunions sont annulées. En 2010, celui sur l’EPR de Flamanville est très critiqué. En 2013, c’est le débat public autour de l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure qui tourne court.

Au café du faire ensemble

Le Café des pratiques semble avoir réussi son pari, ouvrir ses portes à des gens de tout âge, de tout milieu et de toutes les cultures. Chacun peut apprendre ou enseigner des savoir-faire très variés, le tout dans une ambiance chaleureuse !

Avec sa large vitrine où s’affiche le menu, rien, de prime abord, ne différencie ce café d’un autre qui proposerait une restauration le midi. Mais une fois la porte poussée, la décoration évoque plus un atelier d’artiste qu’un troquet. Des poteries sur les étagères, des peintures qui sèchent pendues à des fils, une sorte de grand métier à tisser et un mobilier disparate accueillent ceux qui franchissent la porte du Café des pratiques, ouvert depuis maintenant cinq ans à Besançon.

A Lyon, des chercheurs travaillent pour nous

Depuis trois ans, la capitale rhodanienne s’est dotée d’une Boutique des sciences afin de mettre en relation la société civile et le monde académique autour de projets concrets. Grâce à elle, les associations peuvent bénéficier d’études indépendantes réalisées par un chercheur sur les sujets de leur choix.

 

J'ai testé pour vous : la méthode de recrutement par simulation

Jouer à la dinette pour devenir serveur ou remplir des bacs à glaçons avec des objets de couleur pour postuler à un travail à la chaîne, bienvenue dans le nouveau dispositif test de Pôle Emploi. Voici le témoignage d’un ex-chômeur qui s’est plié à l’exercice.

Tout juste redevenu chômeur, j’apprends que pour postuler à un emploi saisonnier en Franche-Comté (voir encadré), je dois désormais passer un test de simulation. Par exemple, pour un poste de serveur, on te fait jouer à la dînette, m’explique Pôle Emploi en guise de première présentation. Pour le poste « opérateur de ligne industrie agro-alimentaire » (il s’agit dans mon cas d’emballer du fromage à raclette), je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Alors je me suis dit, « essayons toujours, ça restera une incursion ethnologique dans ce que trame aujourd’hui Pôle Emploi ».

Ivre, le Monstre en spaghettis volant créa le monde

Dans les pays où les signes religieux sont autorisés sur les photos officielles, les pastafariens revendiquent le droit de porter une passoire sur la tête. C’est avec une bonne dose d’humour et une reconnaissance officielle de son culte que l’Eglise du Monstre en spaghettis volant veut défendre la laïcité.

Sciences : « Les grandes orientations doivent être données par les citoyens »

Biologiste retraité des laboratoires, Jacques Testart s’est d’abord fait connaître en participant aux recherches sur la fécondation in vitro qui a permis la naissance du premier « bébé éprouvette » en 1982, avant de se faire critique de sciences. À travers une vingtaine d’ouvrages, il dénonce depuis 20 ans les dérives de ces recherches et des sciences en général, et milite pour une démocratisation du secteur scientifique.

 

D’où est venu votre intérêt pour les liens entre sciences et société ?

C’est un cheminement de 30 ans, émaillé d’expériences et de déceptions. Je suis devenu chercheur en 1964, je travaillais sur la multiplication de vaches de haute qualité laitière, par le biais de transplantations d’embryons. En les transférant dans plusieurs vaches, l’objectif était d’obtenir plusieurs petits d’une même vache performante chaque année. Les premiers veaux issus de ces recherches sont nés en 1972. Dans le même temps, les éleveurs bovins connaissaient une grave crise en raison de la surproduction de lait et il y avait même des primes à l’abattage. J’ai réalisé alors le hiatus entre ce programme de recherche et le bien commun. Cela m’a amené à réfléchir au rôle de la science pour la société, à ce qu’elle pouvait apporter aux citoyens. J’ai changé de métier et je suis allé travailler à l’hôpital sur la fécondation in vitro humaine, où j’ai très vite réagi aux dérives : la course à l’argent, le rapport infernal aux médias, les actions aventureuses, etc. On touchait là à l’humain, et pourtant, je me suis vite aperçu qu’il n’y avait pas plus d’éthique qu’avec les vaches. J’ai été déçu car je pensais jusque-là que les sciences étaient ce qui allait sauver le monde. J’ai pris conscience que, comme la plupart de mes collègues, je faisais de la technologie et non de la science, cette dernière consistant à apporter des connaissances sur le monde. J’étais complètement dégouté et j’ai commencé à alerter l’opinion publique sur ces questions. En 2002, j’ai rencontré d’autres chercheurs conscients et on a créé l’association pour une Fondation des sciences citoyennes.

Envies de Commune à la ZAD

Les discussions sur l’avenir de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes se font de plus en plus précises. Accords sur l’usage des terres, mises en place de structures collectives, réflexions sur les communs, etc. Habitantes et habitants, paysannes et paysans, voisines et voisins, amies ou amis, beaucoup se projettent dans l’avenir, pour imaginer ensemble ce que pourrait être la vie sur place une fois le projet d’aéroport enterré.

« À quand des prescripteurs pour récolter l’impôt ? » Éclats de rire sur les bancs de la cabane du Gourbi pour cette blague prononcée lors de la réunion hebdomadaire des habitants de la Zone à Défendre (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes. Parmi la quinzaine de personnes présentes ce soir là, tout juste éclairées par quelques bougies et lampes frontales, personne ne songe bien sûr sérieusement à instaurer une fiscalité. Pourtant, l’argent est une problématique qui reste à gérer collectivement : il s’agit d’éviter que la caisse commune ne se vide plus vite qu’elle ne se remplit. Des sous, il en faut par exemple pour imprimer le ZAD News, le journal local distribué dans la soixantaine de lieux habités de la zone, un outil essentiel de cohésion et d’information sur les décisions prises en assemblée, l’agenda, les débats en cours, etc. «  Il suffirait que chacun de nous donne 10 € par mois et on serait large. » Cette fois, l’affirmation semble satisfaire tout le monde, reste à concrétiser l’idée. C’est une anecdote, mais sans doute révélatrice de certains enjeux discutés sur ce territoire, « en lutte contre l’aéroport et son monde. » Ici s’expérimentent de nouvelles manières de vivre, avec une forte envie de « faire Commune. »

Edito #9 et sommaire

Si certains pouvaient encore en douter, les derniers évènements marquent assez clairement l’importance du moment de rupture que nous sommes en train de vivre. Les attentats de Paris ont plongé la France dans un état de sidération et d’effroi, que n’ont pas arrangé les déclarations martiales des dirigeants politiques et l’évocation par Manuel Valls de possibles attaques chimiques et bactériologiques.