Dans bien des domaines, Kasserine est vraiment une ville pauvre. Avec 40% de sa population au chômage, il est difficile de dire le contraire. Les infrastructures font cruellement défaut, il n'y a guère que le centre-ville qui dispose d'une route à peu près convenable. La ville dispose pourtant de nombreuses ressources, comme l'alfa, plante dont on se sert pour fabriquer du cellulose. Il y a du marbre et des vestiges romains importants. Toutes ces richesses s'en vont ailleurs, à Tunis et sur les côtes tunisiennes. En marginalisant Kasserine, le pouvoir voulait sans doute punir une région éternellement rebelle. Le dernier cinéma de cette ville de 100 000 habitants a fermé il y a quelques années.
Toutes les révolutions et les soulèvements qu'a connus la Tunisie ont commencé ici. Si les richesses ne sont pas mieux distribuées, les habitants se révolteront une nouvelle fois. Contrairement à la mauvaise réputation dont souffrent les kasserinois, je n'y ai vu que des gens extrêmement gentils et accueillants. Un dicton dit que l'on pleure une fois que l'on va à Kasserine et que l'on pleure quand on la quitte.
Du sols au plafond, tout a été pillé, saccagé et brûlé. Même le carrelage à disparu... Des graffeurs ont investi les lieux et ont entièrement repeint plusieurs maisons appartenant à la famille Trabelsi, celle de la femme de Ben-Ali. Ils étaient très connus pour leurs goûts du vol et du racket... Celle-ci se situe vers Marsa, à quelques kilomètres de Carthage.
Le lobby nucléaire arrose d’argent sa future poubelle
Comment faire accepter par un territoire l’implantation d’un centre de stockage de déchets nucléaires ? En lui promettant des millions, bien évidemment. L’Andra, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l’a bien compris, et l’a même fait inscrire dans la loi de 2006 sur la programmation de gestion des déchets nucléaires. Celle-ci définit la création de Groupements d’Intérêt Public (GIP) dans les deux départements concernés, la Meuse et la Haute-Marne, via un « fonds d’accompagnement économique » abondé par les producteurs de déchets, Areva, EDF et le CEA. Restauration d’églises, construction de réseaux d’assainissement, salles communales, aides aux entreprises locales pour acheter du matériel, etc. Les deux GIP financent des dizaines de projets à hauteur de 30 millions d’euros annuels chacun. Les maires en profitent pour développer leur commune. La carotte est si attrayante que la Haute-Marne, où ne sont installés pour le moment que quelques bâtiments techniques de l’Andra, se bat pour faire un peu plus partie de la future poubelle nucléaire. En 2012, son président, Bruno Sido, a ainsi réclamé que la descenderie qui mènera jusqu’au lieu de stockage, à 500 mètres sous la terre meusienne, parte de son département. Le lobby nucléaire, prêt à tout pour se débarrasser de ces encombrants déchets, a donc accepté cet arrangement « avant tout politique », confirme l’Andra. Si le projet se monte, il est d’ores et déjà acté que la Haute-Marne percevra 40% de ces fonds, et la Meuse 60%.