L'école de la bienveillance

srabhi.jpgApprentissage de la vie en groupe, initiation aux arts, respect du rythme de l’enfant… la Ferme des enfants offre depuis 15 ans à ses élèves un cadre idéal pour grandir sereinement, apprendre avec plaisir et devenir un adulte responsable et engagé.

Sur une colline ardéchoise, en bordure des Cévennes, se niche le Hameau des buis hébergeant une vingtaine d’habitants, en majorité des retraités. Au cœur de cet éco-village, la Ferme des enfants accueille 71 écoliers de la maternelle au collège. Sophie Rabhi l’a créée en 1999, pour expérimenter une « école de la bienveillance ». Aujourd’hui, ce lieu intergénérationnel attire de nombreuses familles en quête de convivialité, de sobriété heureuse et d’une éducation porteuse de valeurs qui sont les leurs.  

Le cadre scolaire est privilégié. La grande maison qui sert de bâtiment principal à l’école fait face aux gorges de Chassezac. La salle de classe des primaires, toute en bois, est spacieuse, avec de larges fenêtres  qui laissent entrer la lumière du jour. Dans la cour, on trouve un poulailler, une chèvrerie, un enclos à poneys et un petit jardin cultivé. Les enfants bénéficient à la ferme d’un immense espace de jeux et d’exploration.  
Une dizaine d’instituteurs et d’éducateurs travaillent à plein temps à la Ferme des enfants. Des habitants du hameau et des parents d’élèves viennent également régulièrement animer des ateliers. Les travaux physiques et manuels tiennent en effet une grande place : poterie, peinture, jardinage, soins aux animaux, couture, spéléologie, cuisine, randonnée… chaque jour, les élèves peuvent choisir une activité.

De la maternelle au collège

La pédagogie mise en œuvre est avant tout celle de la bienveillance. « Notre projet éducatif à la Ferme des enfants consiste à préserver ce qui les plus précieux pour chaque personne humaine : son être profond, sa sensibilité et son accomplissement intime », résume Sophie Rabhi qui a écrit un livre sur cette expérience. Les adultes ne sont pas les figures de l’autorité. Ils accompagnent l’enfant dans son désir d’apprentissage. L’objectif est de lui donner « les outils nécessaires pour qu’il devienne un adulte critique, responsable, heureux et libre ». Sophie Rabhi s’est inspirée de diverses pédagogies nouvelles, en particulier Montessori, Krischnamurti et Freinet. En maternelle et en primaire, les élèves disposent des outils Montessori et quelques enseignants sont formés à cette pratique mais ils l’ont adaptée au lieu et à l’époque.

Tous les matins, les enfants du primaire s’assoient en rond dans la yourte pour la séance « Quoi d’neuf ». Ils lèvent la main pour prendre la parole et raconter des évènements de la veille ou à venir qui les ont marqués. Ceux qui ne sont pas en atelier rejoignent ensuite la classe. Chaque élève a son programme pour la semaine, et il s’organise comme il l’entend pour le faire. Au besoin, mais cela arrive rarement, ils ont le week-end pour le terminer. Ils disposent d’énormément de matériel pédagogique dans lequel ils peuvent librement piocher : livres, cartes pour apprendre à lire, tapis de travail, planches pour compter... Les instits passent de l’un à l’autre pour aider ceux qui en font la demande. Chaque semaine se tient un conseil des enfants au cours duquel ils peuvent faire part des problèmes rencontrés au sein de l’école ou proposer des changements.

Le collège, qui existe depuis trois ans, accueille cette année 19 enfants. La pédagogie proposée ne se rattache pas directement à un courant, mais elle est dans la continuité de l’école primaire. Les cours se déroulent dans deux yourtes érigées dans la cour. Pour ceux qui sont en 3ème, le programme est plus proche du classique que dans les niveaux inférieurs, afin de préparer l’examen de fin de collège qui permettra à ceux qui le veulent d’intégrer un lycée. Mais au collège aussi, l’accent est mis sur l’apprentissage de l’autonomie. Suivant les matières, les élèves sont parfois divisés en sous-groupes, mais il y a beaucoup de cours communs.

Seul bémol à cette école : son coût d’environ 250 € par mois et par enfant. C’est peu pour une école privée dotée d’outils Montessori, mais cela représente un sacrifice important pour certains parents. A cette somme s’ajoute une part en nature, les parents étant invités à animer des ateliers ou aider à l’entretien du bâtiment à raison de 4h par mois. De fait, la mixité sociale et politique n’est pas vraiment au rendez-vous. « Pour que mon enfant ait une ouverture plus large sur le monde, je ne le laisserai peut être pas au collège », nous explique la mère d’un garçon scolarisé en maternelle à l’école des enfants. En attendant que « l’école change de l’intérieur », cette école lui permet d’offrir à son enfant un lieu où il peut grandir sereinement, développer sa confiance en lui, satisfaire sa curiosité et expérimenter la vie en groupe.

Sonia

Pour en savoir plus : http://www.la-ferme-des-enfants.com/


Cet article est tiré du dossier "Pour une école émancipatrice", paru dans le magazine papier numéro 3 sorti en mars 2014. Pour commander ce numéro, c'est ici

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